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À LIRE | POURQUOI FUMER, C’EST DE DROITE ? D’OLIVIER MILLERON

Le tabac est la première cause de mortalité évitable en France, avec environ 75 000 décès chaque année. Malgré les campagnes de prévention, les hausses de prix et les aides au sevrage, la consommation persiste, particulièrement au sein des populations les plus précaires.


Dans son essai Pourquoi fumer, c’est de droite, Olivier Milleron, cardiologue à l’hôpital Bichat et ancien fumeur, propose une réflexion captivante. Il révèle comment l’industrie du tabac s’est construite et prospère à travers les pires excès du capitalisme et du colonialisme. Selon lui, fumer ne revient pas seulement à mettre sa santé en danger, mais aussi à financer une industrie marquée par l’exploitation coloniale, l’esclavage, le travail des enfants, la corruption scientifique et politique, ainsi qu’une pollution massive.


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Résumé du livre :


Radiographie d’une industrie cynique et destructrice :

Pourquoi le mouvement social qui dénonce les multinationales, la malbouffe et les industries polluantes ne s’attaque-t-il pas à l’industrie du tabac ? Pourquoi le blackbloc prend-il pour cible des banques ou des fast-foods mais pas les bureaux de tabac ? Pourquoi beaucoup de militants anticapitalistes et écologistes continuent à fumer ? Car fumer et financer les grandes firmes du tabac posent un problème politique : l’industrie du tabac a toujours été à la pointe dans ce qui se fait de pire dans l’histoire du capitalisme.

 

Raconter le succès et l’histoire de l’industrie du tabac, c’est raconter le capitalisme dans ce qu’il a de plus destructeur et cynique : l’esclavage, le travail des enfants, la propagande, la stratégie du doute, la corruption des scientifiques et des politiques, la pollution, l’exploitation des paysans des pays pauvres, les tribunaux arbitraux supra-nationaux qui mettent à mal les démocraties, etc.
L’industrie du tabac est, comme le capitalisme, devenue plus puissante que les États : elle nous empoisonne et nous tue à petit feu.
Fumer et donc financer consciemment une telle industrie, c’est choisir son camp.

 

 

Le tabac, produit du capitalisme

Olivier Milleron s’étonne que dans les milieux militants de gauche, où l’on critique les multinationales, les fast-foods ou les banques, la question du tabac reste absente. Pourtant, la cigarette est un produit inutile, addictif, extrêmement rentable et lourd de conséquences sociales, environnementales et sanitaires : un produit capitaliste. Le tabac est un marqueur des inégalités sociales : sa consommation est plus élevée parmi les populations précaires, creusant encore les écarts de santé. Selon Santé publique France : « Les inégalités sociales en matière de tabagisme restent très marquées, avec 12 points d’écart de prévalence du tabagisme quotidien entre les plus bas et les plus hauts revenus (28,9 % versus 17,3 %), écart observé également selon le niveau de diplôme ou selon la situation professionnelle (personnes au chômage versus actifs occupés). »

 

 

Une industrie qui tue

Chaque année, 7 millions de personnes dans le monde (Chiffre OMS) meurent du tabac dans le monde, dont 75 000 en France. Première cause de mortalité évitable, ses dégâts dépassent pourtant la seule dimension sanitaire :


  • Exploitation des plus vulnérables

Environ 1,3 million d’enfants travaillent encore dans la production de tabac, souvent au détriment de leur scolarité. Privés d’éducation, ils voient leur avenir compromis.Les compagnies entretiennent volontairement la précarité des producteurs : salaires bas, prêts imposés, dépendance économique… Les planteurs, pour survivre, n’ont d’autre choix que de faire travailler leurs enfants.


  • Un désastre environnemental

Les ravages causés par l’industrie du tabac touchent toutes les étapes de son cycle de vie, de la culture à la consommation :

  • 200 000 hectares d’arbres accaparés chaque année,

  • 600 millions d’arbres abattus, soit 5 % de la déforestation mondiale,

  • 22 milliards de tonnes d’eau par an dans des régions souvent pauvres en ressources,

  • 84 millions de tonnes de CO2 émises annuellement (soit 14 g de CO2 par cigarette).

Lorsqu’elle est consommée, la cigarette libère environ 7 000 substances toxiques, dont 70 cancérigènes, qui contaminent l’air, les surfaces et exposent les non-fumeurs au tabagisme passif.


  • La stratégie du doute

Face aux preuves scientifiques, les industriels ont choisi la manipulation.Dès les années 1950, plutôt que de contester frontalement la dangerosité du tabac, ils ont semé le doute, financé des études biaisées et insisté sur la nécessité de “poursuivre les recherches”. Cette stratégie leur a permis de prolonger leurs profits pendant plusieurs décennies, au prix de millions de vies perdues.


Selon Olivier Milleron : « Avant la Seconde Guerre mondiale, il y avait des preuves assez fortes. Et dans les années 50, il y avait vraiment de la littérature puissante pour dire que le tabac était lié en particulier au cancer. À ce moment-là, les grands vendeurs de cigarettes se sont dit que ça allait devenir compliqué de continuer leurs profits et donc ils sont allés voir un consultant qui a inventé la stratégie du doute. En une semaine, il leur a fait un mémo, leur a dit qu'il ne fallait pas contester frontalement l'idée de dangerosité, mais instiller un doute, et dire qu'il fallait continuer à faire de la recherche médicale. C'est ce qu'ils ont fait pendant 40 ans. »

 


Le tabagisme en chiffres

En France, en 2023, 31,1 % des adultes déclaraient fumer, dont 23,1 % quotidiennement. Même si la prévalence du tabagisme quotidien est plus bas, les inégalités sociales restent fortes : 28,9 % des plus bas revenus fument au quotidien, contre 17,3 % des plus hauts revenus.


Points clés de Santé publique France (novembre 2024) :

  • En 2023, en France hexagonale, plus de trois personnes de 18-75 ans sur dix déclaraient fumer (31,1 %). Moins d’un quart déclaraient fumer quotidiennement (23,1 %), avec un niveau plus élevé parmi les hommes (25,4 %) que parmi les femmes (20,9 %). Il s’agit de la prévalence du tabagisme quotidien la plus faible jamais enregistrée depuis que cet indicateur existe.

  • En parallèle de la baisse du tabagisme quotidien, la prévalence du tabagisme occasionnel a augmenté depuis 2021 pour atteindre 8,0 % en 2023. La prévalence du tabagisme, quotidien ou occasionnel, est ainsi globalement stable entre 2021 et 2023.

  • En 2023, 8,3 % des 18-75 ans déclaraient vapoter. La prévalence du vapotage quotidien était de 6,1 % (6,8 % parmi les hommes et 5,4 % parmi les femmes). Ces proportions sont en hausse depuis 2016.


Dans le monde, on recense 1,3 milliard de fumeurs (OMS), dont 80 % vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire, où le tabac participe à l’entretien de la pauvreté. Le tabac fait plus de 7 millions de morts chaque année, dont 1,6 million de décès par tabagisme passif chaque année.


 

Un enjeu majeur de santé publique

Le tabac reste l’un des premières causes de mortalité évitable en France, il est responsable de cancers, de maladies cardiovasculaires, respiratoires et de multiples pathologies chroniques. Son coût social est immense, pesant sur les systèmes de santé et sur la qualité de vie des malades et de leurs proches. La baisse progressive du tabagisme en France montre toutefois que les politiques de prévention et d’accompagnement fonctionnent.

 

Arrêter le tabac : un enjeu individuel et collectif

Arrêter de fumer, c’est évidemment un choix de santé, mais aussi un geste politique. Refuser de financer cette industrie revient à rejeter un modèle destructeur, fondé sur l’exploitation et la mort.

En France, plusieurs outils gratuits d’aide à l’arrêt sont disponibles :

  • Le 39 89 : un numéro d’aide à distance, accessible aux personnes sourdes ou malentendantes.

  • Le site tabac-info-service.fr : ressources, témoignages, mise en relation avec des tabacologues.

  • L’application d’e-coaching : programme personnalisé pour optimiser les chances d’arrêt définitif.

  • Chaque année, l’opération Mois sans Tabac permet également de renforcer la dynamique collective en proposant un défi national pour arrêter de fumer ensemble. : mois-sans-tabac.tabac-info-service.fr/

 

Une réflexion qui interpelle

L’essai d’Olivier Milleron ouvre un nouveau débat : peut-on encore se dire anticapitaliste, écologiste ou militant progressiste tout en continuant à financer une industrie qui incarne le pire du capitalisme mondialisé ?


Son propos, volontairement provocateur, invite chacun à réfléchir à ses choix de consommation et à leurs implications collectives. Et si, finalement, la meilleure raison d’arrêter de fumer était à la fois de protéger sa santé et de refuser de soutenir une industrie qui prospère sur la maladie et la mort ?

 

Pour aller plus loin :

 




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Sources :


Céline BIOT
Céline BIOT

 

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